Les amis d’Urbain trop urbain viennent de sortir, après un an de travail, leur no city guide sur Shanghai : présentation ici, extrait là et article critique là. Dans l’énorme revue (téléchargeable), au milieu des articles critiques, vidéos, portraits littéraires et photographiques, carottes sémiotiques et des promenades transdisciplinaires, vous pourrez lire « Shanghai de jour », dont voici un extrait :
On se lève au milieu d’algues bleues dans le bouquet
des tours mouillées danseuses a-
gitées par de la bruine –
qui brouille les contours fait baver la lumière
silence hors des cellules la couleur
poussée par les visages verts
de bouche en bouche et Lao-Lang
viendra-t-elle aujourd’hui ?
assis sur un rebord de mon
lit vers l’ouest – à regarder
tous ceux qui pénètrent le jour
par les sous-sols –
je ne lèverai pas la tête
fatiguée de visions, soleil m’apparaît sans
les vagues promissions, déplié, que la nuit peut nouer
dans le bleu-gris des rêves, déposées sous la peau étourdie
(– quoi ? y a-t-il encor ce que l’on appelle « les rêves » ? Et « la nuit » ? « soleil », « les noeuds », « la peau ? »), soulagé : je n’entends plus la voix de ceux qui chantaient hier ou pleuraient au milieu des klaxons, se jetaient sous les roues et dont les os craquaient, osselets, récitant leurs articulations anciennes –
ils tenaient à
leur propre plainte au lieu
et poétiquement
or
今天 nous sommes de ce côté-
ci de soleil avec des tours aux pieds de bicyclette 自行车
et des éclats de verre
dans le béton
(quelqu’un a d’autre choses à faire
que tenir lieu des noms
ne dégoberai plus ces balles
même dans le milieu
en riant, pour des ciels vides
j’essaie plutôt de dire ce qu’il y a très vite
et par les quatre tons d’une autoroute en bouche dont mon corps serait l’échangeur – blanches bleues me traversant par les syllabes – en mandarin –
telle qu’une première phrase éclat
sang dans la bouche
à éternuer misérablement
les significations suivantes des sons dans n’importe quel ordre – lambeaux en travers de la langue –
passons)
Lao-Lang est là me regarde
dégoûtée
plantée sur son bassin de mère, avec ses bras noueux qui remuent et ce torse –
老狼 –
les paysans font-ils des enfants dans les champs ? Je contemple son front, ses longs cheveux épais venus des campagnes d’An hui
安徽
pour s’occuper
silencieusement de ma vaisselle (je me tourne soleil –
lorsque tu fixeras des formes
ma voix tiendra les forces
peut-être dis-je
que les mots ne sont pas des centimètres secondes
chinoises et les noms des verbes fatigués
que les bouches enroulent déroulent
autour de moi – je passe)
dans ce concert poursuivant le présent
tâchant d’en arrêter l’idéogramme et regarder dedans –
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